Place aux récits de jeunes d’ici.

Le 7 juin prochain aura lieu, pour une deuxième année consécutive, la présentation du spectacle Histoires à venir… dans lequel des adolescent.es des classes de francisation et du PEI (Programme d’éducation intermédiaire) de l’École polyvalente de Saint-Jérôme, originaires de la Syrie, de la Colombie, du Congo, du Centre de l’Afrique et du Rwanda, se donnent la réplique en partageant des récits d’immigration vécus par leurs camarades de classe. C’est un projet recueillant de belles leçons d’adaptation, de résilience et de courage.

Le spectacle est pensé en trois grands récits et mis en scène par Marie-Ève Gervais, enseignante en francisation, et Tomas Sierra, intervenant, formateur et metteur en scène. En soi, l’objectif du spectacle est d’influencer positivement le parcours d’immigration des étudiant.es et de sensibiliser ceux et celles qui les entourent.

Les récits racontés sont décidés lors d’ateliers de théâtre, offrant ainsi un lieu d’expression et de création pour les jeunes, leur permettant ainsi de développer leur estime de soi (personnelle et collective), tout en leur offrant un espace propice à concrétiser leurs histoires personnelles et développer un sentiment de pouvoir sur leur propre destin. De plus, l’utilisation du jeu théâtral permet une certaine distance émotionnelle face aux événements racontés et favorise l’expression non verbale. Cela permet aussi de leur offrir un climat sécurisant et respectueux, dans lequel il est possible d’aborder des sujets plus difficiles tout en sachant que les possibles tensions qui en découlent seront contenues par le groupe et les intervenant.es.

Avant d’être partagé au grand public, ce projet théâtral a été présenté aux étudiant.es de l’École polyvalente et a été suivi d’une discussion entre les jeunes spectateur.rices et les acteur.rices. Ce moment d’échanges a permis à tous.tes d’aller à la rencontre de l’autre, en développant son écoute, son empathie et le respect des différences. De ce fait, lors de la représentation du 7 juin au Théâtre Gilles-Vigneault, les spectateur.trices auront aussi droit à une période de questions après la représentation. 

Enfin, ce projet s’inscrit dans une recherche partenariale qui a commencé il y a plus de 15 ans, dans les écoles du grand Montréal, en collaboration avec des enseignant.es du réseau et des intervenant·es de l’Institut Universitaire SHERPA et ÉLODiL de l’Université de Montréal.

Le projet Élodil, qu’est-ce que c’est?

Il s’agit d’une approche d’éveil au langage et d’ouverture à la diversité linguistique qui vise à favoriser le développement et l’intégration des personnes en francisation. 

Au Québec, ça se traduit par les objectifs suivants : 

  • Développer des attitudes positives face à la diversité linguistique et culturelle.
  • Permettre sur le plan de la structuration linguistique, le développement d’habiletés de réflexion sur la langue (capacités métalinguistiques).
  • Faciliter, en milieu pluriethnique, la reconnaissance et la légitimation des langues d’origine des enfants immigrants allophones.
  • Faciliter l’apprentissage du français et la prise de conscience du rôle social et identitaire du français langue commune.

Source : http://www.elodil1.com/qqc.html

Divisé en trois phases, ce projet a pour objectif de soutenir la réussite des élèves appartenant à certaines minorités stigmatisées et marginalisées et favoriser l’intégration scolaire et l’éducation interculturelle.

Comprendre les relations interculturelles telles qu’elles sont perçues et vécues par les jeunes de l’accueil et les familles engagées dans des activités d’expression créative.

 

Les jeunes ont pu explorer :

  1. L’appartenance/la non-appartenance/les identités plurielles/l’interculturel;
  2. Les histoires personnelles/les trajectoires de vie;
  3. Le bien-être, la réussite scolaire;
  4. L’inclusion/l’exclusion;
  5. La parole individuelle et collective/les prises de position;
  6. La justice/les injustices/la quête d’engagement.

Développer et mettre en œuvre des créations artistiques co-construites avec les jeunes et les familles

 

Le but de cette phase du projet est de valoriser les diverses identités, de renforcer les sentiments d’appartenance et de construire des récits partagés afin d’améliorer les relations intercommunautaires. La création sera amenée dans deux espaces différents avec les spécialistes Sherpa-Élodil, soit à l’école et au COFFRET afin de construire une création intergénérationnelle tout en diversifiant les modèles de relation entre l’école et les familles.

Promouvoir les échanges entre les jeunes et les familles qui participent au projet à travers les ateliers de créations intergénérationnelles et interculturelles.

 

Nous en sommes déjà à la troisième et dernière phase du projet. Des représentations et des rencontres interculturelles seront organisées à l’école entre les élèves du régulier, les étudiants de la classe de francisation et leur famille. Des représentations du spectacle et des rencontres interculturelles auront lieu au Théâtre Gilles-Vigneault entre les citoyens de Saint-Jérôme, la classe de francisation et leur famille.

Qu'est-ce que l'interculturel ?

Dans le domaine de la psychologie et de la sociologie, l’étude des relations interculturelles porte sur les contacts de culture. Lorsque des personnes de cultures différentes interagissent, elles mettent en commun pour communiquer, des éléments culturels qui leur sont propres tout comme certains qui leur sont communs, mais font également appel à des apports culturels qui leur sont extérieurs. Une sorte de « bricolage culturel » va se mettre en place leur permettant de dépasser les différences, sources d’obstacles à la communication, voire de les exploiter pour créer un nouvel espace culturel d’interaction, avec un nouveau code culturel. Il ne s’agit plus d’un pont entre les cultures, mais bien d’un mélange de différents rapports culturels. (Source : Interculturel, Wikipédia)

Comment l'interculturel se traduit-il au Théâtre ?

Il existe plusieurs façons de réaliser l’interculturel au théâtre. L’exploration des différentes formes et des fondements théoriques de l’interculturalité nous a amenés à favoriser une approche qui met au centre de la création les histoires personnelles des jeunes participants. Pour ce faire, nous avons utilisé la méthode de création théâtrale appelée cycles Repère.

 

C’est en 1980 que Jacques Lessard propose le processus de création appelé les « cycles Repère ». Les cycles Repère sont une démarche cyclique pour la création d’un spectacle théâtral et pour l’interprétation de textes. Les quatre étapes évolutives sont identifiées comme étant « Re » pour Ressource, « P » pour Partition, « E » pour Évaluation et « Re » pour Représentation.

Les trois premières étapes sont associées à la préreprésentation et la dernière au contact du spectacle avec le public. Les quatre étapes ont comme principe un développement en forme de spirale, c’est-à-dire irréversible et circulaire.

Comment l'idée d'interculturalité s'est-elle déployée dans le cadre du projet ?

Notre projet de création a voulu dynamiser les histoires de jeunes, qui sont nos premières ressources sensibles. Nous avons procédé dans un premier temps par l’accumulation d’histoires exprimées par les participants.

Ensuite, l’idée a été d’organiser dans une « partition » toutes les histoires proposées pour le spectacle. C’est d’ailleurs à partir d’un espace ludique, où le plaisir du jeu et l’improvisation sont expérimentés par les jeunes comédiens, qu’il a été possible de construire et d’approfondir cette partition de plus en plus complexe jusqu’à la composition finale du spectacle.

Dans un premier collage de ressources (histoires), il a été possible de découvrir des personnages, des situations dramatiques, des espaces, des textes, etc.

Ensuite, cette partition est devenue une ressource pour de nouvelles explorations jusqu’à aboutir à une proposition plus structurée pour la représentation finale.